Cet automne accompagne la riche parution de très beaux livres graphiques. Les éditions Martin de Halleux achèvent, avec deux nouveaux volumes, la remarquable publication des oeuvres du Belge Frans Masereel, tandis que Monsieur Toussaint Louverture édite en un très beau coffret de romans sans paroles gravés sur bois par l'Américain Lynd Ward, dont Masereel fut l'inspirateur.
Chef d'oeuvre de Frans Masereel, tout à la fois roman d'apprentissage, récit d'aventures picaresques et récit biographique, Mon livre d'heures relate les pérégrinations de l'alter ego de l'auteur aux prises avec les réalités du monde. Articulé en une série de séquences narratives, le récit prend forme au gré de ses déambulations et de ses rêveries. Anarchiste libertaire déclaré, il préfère jouir des plaisirs de la vie que des joies du travail.
Citoyen du monde qui ignore frontières et préjugés, il choque les esprits étriqués et vit sa vie sans contraintes en pleine liberté.
Au printemps 1919, Masereel ouvre les fenêtres de son atelier pour laisser passer la lumière et réaliser les soixante-trois gravures sur bois de son nouveau roman en images : Le Soleil. L'inspiration tardant à venir, il s'assoupit tout en laissant sortir de sa tête un alter ego qui se met à vouloir saisir l'inaccessible étoile. Prenant ses jambes à son cou, il se met à courir les rues et battre la campagne, à grimper quatre à quatre les escaliers, à monter aux cheminées et dans les arbres, à se hisser en haut d'une grue ou du mât d'un voilier, à surfer sur la crête d'une vague pour toucher du doigt le Soleil.
Parue en 1928, L'Oeuvre, composée de soixante bois gravés, fait le récit des aventures d'un géant qui échappe à son créateur et sème le chaos dans le décor d'une grande ville.
Tout commence dans l'atelier du sculpteur où un monumental bloc de pierre, soutenu par de solides étais, attend la taille. De l'ébauche, dégagée grossièrement à coups de ciseau et de maillet se détache bientôt la silhouette du géant. L'oeuvre, à peine achevée, prend alors mystérieusement vie au cours de la nuit...
Cette édition de L'oeuvre est la première à voir le jour en France depuis la première édition de 1928.
En 1918, Frans Masereel publie 25 images de la Passion d'un homme, chef d'oeuvre graphique, considéré comme le premier roman sans paroles moderne, qui inspira des générations d'illustrateurs et de créateurs de bande dessinée.
Après avoir mis son talent de dessinateur au service de la cause pacifiste, Masereel signe ici l'histoire d'un idéaliste qui a tort de naitre pauvre et de vouloir vivre en homme libre.
Cette édition de 25 images de la Passion d'un homme est la première à voir le jour en France sous la forme d'un livre depuis la première édition de 1918.
Publiée pour la première fois en 1920, cette oeuvre maîtresse de Frans Masereel raconte en 83 images la vie d'une idée. Cette idée qui prend la forme d'une femme est rebelle et subversive, elle sème sur son chemin zizanie, peur, rejet ou étonnement, mais ne laisse jamais indifférent. Elle ira jusqu'à se reproduire en se jetant entre les cylindres d'une presse d'imprimerie pour répandre un peu plus encore le doute et la liberté au coeur d'une société injuste et violente.
« Aujourd'hui, comme il y a cinq cents ans, il suffit de rien d'autre que d'un morceau de bois de poirier, d'un petit couteau... et du génie d'un homme.» Thomas Mann
Chef-d'oeuvre de Frans Masereel, maître du bois gravé moderne et précurseur du roman graphique. Cette édition de La Ville rassemble de nombreuses images encore jamais publiées, dessins, ébauches et épreuves préparatoires de l'oeuvre majeure de Frans Masereel.
« La Ville est un monument. Monument impérissable consacré à la ville moderne, avec ses foules innombrables et leurs destins multiples, avec ses contrastes tragiques de luxe et de pauvreté, de gaspillage et de privation, un véritable pandémonium de toutes les passions humaines. » Stefan Zweig « Dans ses rues on peut sentir presque physiquement le tourbillonnement des impulsions et des tensions que ces hommes portent en eux, qu'ils respirent, et qui s'empare d'eux. » Alfred Döblin
Cette monographie - Frans Masereel, l'empreinte du monde - consacrée à l'oeuvre de Frans Masereel (1889-1972) maître du bois gravé moderne et précurseur du roman graphique, est la plus importante encore jamais publiée avec une sélection de 391 gravures sur bois.
Les gravures reproduites ici ont été retrouvées dans des fonds à travers toute l'Europe, musées ou collections privées, principalement en Allemagne, en Belgique et en France...
Le lecteur pourra également découvrir un texte exceptionnel inédit, des entretiens de Frans Masereel avec son éditeur Pierre Vorms dans lesquels l'artiste évoque la genèse de ses travaux et notamment de la création de ses romans en images, comme Mon Livre d'heures (1919), Le Soleil (1919), Idée (1920) ou encore La Ville (1925), qui l'ont rendu célèbre dans le monde entier.
Avec ses romans sans parole, Frans Masereel est aujourd'hui considéré comme l'un des précurseurs du roman en images moderne. Assez vite, l'influence de Masereel dépassera les frontières de l'Europe et gagnera les grands graveurs américains tel Lynd Ward (Wild Pilgrimage, 1932). Puis, avec le renouveau de la BD, il est redécouvert par les précurseurs du roman graphique tels que Art Spiegelman (Maus, 1986) ou encore Eric Drooker (Flood!, 1992) qui signe la préface de la présente monographie.
Un essai de Samuel Dégardin propose une vision de « l'oeuvre au noir » de Masereel, de ses romans en images, aux grandes planches, en passant par son travail d'illustrateur au service de la cause pacifiste.
Une série de photographies viennent illustrer une biographie signée Joris van Parys avec de rares images où l'on peut voir Frans Masereel posant avec son ami Stefan Zweig en 1922 à Salzburg ou encore avec George Grosz en costume de bain en 1925 sur une plage de Boulogne-sur-Mer. Des images qui nous plongent dans l'Europe de l'entre-deux-guerres où une poignée d'amis, artistes et écrivains, pacifistes, socialistes, communistes, anarchistes ou tout simplement, comme Masereel, épris de liberté et de justice, va tenter de lutter contre l'inexorable et funeste destin de nations courant à leur perte.
Frans Masereel cultivait l'amitié des écrivains comme Romain Rolland et Stefan Zweig ses deux grands compagnons de lutte contre la guerre, mais également Pierre Jean Jouve, Thomas Mann ou encore Hermann Hesse qui préfaceront ses ouvrages.
Réunies en douze chapitres (La guerre danse macabre ; Du côté des faibles et des opprimés ; Dans les villes ; Dans les ports ; Bestiaire ; Nature ; Les Flandres, la Belgique ; Amour, désir et séduction ; Moments intimes ; Spleen ; Figures ; Rebelle et libre) ces 450 gravures de Frans Masereel offrent un panorama inédit de son univers graphique à travers les grandes thématiques qui traversent toute sa production de 1919 à 1971.
Tout au fil de son oeuvre, Masereel nous propose sans relâche sa vision du monde. Un monde ancré dans le quotidien, sans filtre et sans effet inutiles, dans lequel les fracas de la guerre font trembler l'air saturé d'effrois. Un monde où la révolte gronde et où les hommes se lèvent et tombent. Mais aussi, un monde où le souffle de l'amour et de la passion embarque les coeurs des femmes et des hommes vers des rivages heureux où l'on peut croire en un monde meilleur.
Car Masereel a foi en l'homme. C'est un optimiste qui reste persuadé que les actes peuvent exercer une influence positive sur le destin de l'humanité. Il fait le pari de l'intelligence et de la créativité, de la justice sociale et de la liberté individuelle. Il est persuadé que l'art et la littérature ont le pouvoir de changer le monde. Alors, il se bat, il dénonce et vit pleinement sa vie d'artiste engagé dans le tumulte du monde.
Avec le soutien à l'édition du Centre national des arts plastiques.
En seulement six livres, Lynd Ward (1905-1985) s'est imposé comme l'un des précurseurs du roman graphique. Ses histoires - de l'artiste qui vend son âme, au couple pris dans les tourments de leur époque, en passant par l'homme maudit de ses péchés et l'ouvrier rebelle à la psychée tourmentée - ont su capturer un monde plein de contradictions dans des images d'une époustouflante modernité. Sur les pas de Frans Masereel et d'Otto Nückel, ces récits en gravures sur bois, ou romans sans paroles, dessinent les contours d'une oeuvre riche et exaltée.
Livre après livre, cette anthologie donne à voir comment Lynd Ward, innovateur acharné, s'est créé un moyen d'expression rarement égalé en termes de puissance narrative, de construction de personnages, d'imaginaire et de techniques, où le lecteur écrit l'histoire autant qu'il la lit.